« Être bien dans sa peau ». Cette expression révèle une vérité profonde : notre sécurité intérieure et notre identité reposent sur un contenant psychique fiable. Le psychanalyste Didier Anzieu a théorisé cette réalité dans son ouvrage fondateur Le Moi-peau.
Le Moi-peau est une enveloppe psychique qui remplit plusieurs fonctions vitales :
Quand ce contenant psychique est défaillant, la souffrance est intense. Servane, 15 ans, que j’ai accompagnée, illustrait cette fragilité : vide intérieur, porosité au jugement, gestes d’agrippement à sa propre peau. Privée d’une présence maternelle contenante, son Moi-peau restait fissuré, incapable de lui offrir la sécurité intérieure dont elle avait besoin.
Bien avant Anzieu, la psychologie des profondeurs de Carl Gustav Jung avait déjà exploré le symbolisme du contenant.
La Persona est notre masque social, l’équivalent d’une peau tournée vers le monde. Utile pour s’adapter, elle devient problématique si l’on s’y identifie totalement, oubliant la richesse de l’être intérieur.
Pour Jung, toute confrontation à l’inconscient exige un temenos, un espace sacré de protection. Ce cercle magique correspond aux fonctions de contenance et de pare-excitation du Moi-peau. En psychothérapie, le cadre régulier et fiable joue ce rôle de Moi-peau auxiliaire.
Dans l’alchimie, aucune transformation n’était possible sans un vase solide. Jung en a fait la métaphore de la psyché. Un Moi-peau solide est ce vase hermétique qui supporte la tension des opposés. À l’inverse, un vase fissuré laisse fuir l’énergie psychique sous forme d’angoisse ou de symptômes. La psychose peut même s’apparenter à l’éclatement du vase.
Face à un consultant dont le Moi-peau est fragilisé, la première urgence n’est pas d’interpréter, mais de contenir.
La présence constante, empathique et fiable du thérapeute devient une fonction de maternage symbolique. Le cadre thérapeutique agit alors comme une peau de substitution, permettant de restaurer la sécurité intérieure.
Les pratiques psychocorporelles, telles que la relaxation et le travail sur la peau, contribuent à retisser l’enveloppe psychique. Elles agissent depuis la base archaïque de la sensation, consolidant progressivement le contenant.
Quand le Moi-peau est réparé et que le vase psychique est solide, le consultant peut alors accueillir ce que l’inconscient contient : Ombre, Anima, Animus, messages du Soi. L’individuation devient possible, vécue non comme une menace, mais comme une transformation créatrice.
Le Moi-peau est l’ancrage personnel, tandis que le vase alchimique est son reflet archétypal. Réparer le premier permet de préparer le second. C’est seulement en étant paisiblement « dans sa peau » que l’on peut entreprendre, avec courage, le voyage vers la rencontre de son âme.
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Le Moi-peau, théorisé par Didier Anzieu, désigne l’enveloppe psychique qui protège, contient et structure l’identité. Il s’appuie sur les premières expériences de contact et de soin dans la relation mère-enfant.
Un Moi-peau défaillant peut se manifester par un sentiment de vide intérieur, une difficulté à se protéger des jugements, des angoisses diffuses, ou encore des troubles du rapport au corps et à la peau.
La relation psychothérapeutique agit comme un contenant symbolique. Par la constance et l’empathie du thérapeute, mais aussi grâce aux approches psychocorporelles (relaxation, travail sur la respiration et la peau), il est possible de réparer et renforcer le Moi-peau.
Le Temenos et le Vas en psychothérapie Jungienne
Blog jungien sophrologie psychologie symbolique : 3 clés essentielles
Livre : Le Moi-peau de Didier Anzieu
Bien chaleureusement,
Rachel... Sur les Chemins de VITRIOL